📀 Jewel Usain - Où Les Garçons Grandissent
Présent depuis presque 10 ans sur la scène rap française, Jewel Usain était resté un acteur discret pour le grand public, n’ayant pas encore capitalisé sur des singles et projets réussis. Tout s’apprête à changer avec ce 1er album qui se veut clairement celui de la maturité.
1) Introspection Dès son titre, Où Les Garçons Grandissent, on comprend la direction forte que Jewel Usain souhaite emprunter sur cet album. Un album introspectif, mettant la perspective sur son parcours entre doutes et ambition. On retrouve des thèmes forts comme l’accès au succès, la paternité ou la gestion de ses relations. L’intro “Compliqué” donne le ton. Jewel Usain ouvre l’album avec une analyse de sa situation personnelle à la sortie de son précédent projet “Mode Difficile”, venant juste de quitter son travail pour vivre de sa musique.
On retient la pique lancée aux journalistes qui lui demandent ses inspirations : lui-même.
Un message qui semble se diluer au fil de ce 17 titres, utilisant temporairement la métaphore d’une voiture de luxe et des interludes scénarisés. L’artiste fait mouche quand il aborde plus directement son vécu sur des titres forts comme “Je reste là” ou “Bleu marine”.
2) Production Pour son 1er album studio, Jewel Usain s’est entouré de musiciens talentueux. Loin des boucles de samples qui ont vu naître notre cher rap, cet album laisse la place belle aux compositions instrumentales. Un choix audacieux mais bien exécuté qui vient décupler les émotions véhiculées par l’artiste. Un chef d’orchestre vient mener la danse. Le trompettiste et beatmaker de talent Béesau, ayant sorti l’excellent “Coco Charnelle” et ayant produit sur “L’Amour” de Disiz ou encore “Anagenese” de Kobo, embrasse ce rôle à merveille. Il chapeaute la production du projet et marque les instrus de ses apparitions à la trompette. Des productions qui n’ont pas vocation à faire des hits, mais participent à définir cette ambiance que l’on retrouve dans les visuels de l’album. Venant incorporer différents instruments, des chœurs et mêlant à son rap des passages chantés, Jewel Usain cherche les émotions les plus puissantes pour nous conter son parcours.
3) Curation
Pour porter cette nouvelle ambition dans sa musique, Jewel Usain semble s’être inspiré des projets les plus touchants de ses derniers mois sur la scène rap francophone. “Moussa” de Prince Waly et “Bleu Gospel” de Tuerie viennent immédiatement en tête.
On retrouve d’ailleurs les 2 artistes en featuring sur l’album. Prince Waly le rejoint pour un passe-passe excellent qui marque le point culminant de l’album. Tuerie intervient sur un titre plus intimiste et vient nous rappeler une nouvelle fois qu’en rap, comme en chant, personne ne sait le faire comme lui. Est-ce que Jewel Usain à la singularité d’un Waly ou d’un Tuerie ? C’est ce qu’il tente de nous prouver.
Où Les Garçons Grandissent semble plus calculé que ses références, mais les maths sont bons.
Seules les émotions que ressentira le public à son écoute jugeront s’il peut prétendre à s’asseoir à leur table. 4) Coup de pinceau Du côté des visuels, Jewel Usain vient placer la barre haute. Le clip d’Eleanor avec Prince Waly nous transporte dans un film d’action à l’esthétique plus léchée que le dernier James Bond. La mise en scène de cette quête d’une voiture mythique s’inscrit facilement comme un des plus beaux clips de ces dernières années. Pour ce qui est de la cover, on partait de loin avec celle de son dernier projet, digne d’une affiche d’un mauvais film avec Dwayne Johnson. Où Les Garçons Grandissent rejoint le club grandissant des covers peintes, illustrant parfaitement sa thématique en détournant la frise de la théorie de l’évolution.
Le vinyle, lui, se décrit en un mot : sublime. C’est en ouvrant la pochette qu’on découvre les crédits et remerciements sur de magnifiques illustrations d’Alegria Blue. Avec une excellente qualité sonore, un double vinyle disponible à 28 € chaudement recommandé et disponible ici :
5) Ascension
S’il est encore trop tôt pour savoir si Jewel Usain va rentrer dans le top 10 des rappeurs actuels qu’il convoite à plusieurs reprises sur le disque, il s’en donne les moyens. Lui qui souhaite ardemment piloter son “Eleanor”, il prend les rênes à deux mains et se lance sur la piste. Troquant la trap pour les solos de trompettes, ce 1er album sonne comme une ligne d’arrivée pour l’artiste, nous dépeignant ses difficultés à atteindre son statut actuel dans la musique. Pourtant, Où Les Garçons Grandissent est surtout un nouveau coup d’envoi pour Jewel Usain.
En se concentrant une nouvelle fois sur la cover de l’album, on remarque comme un vide sur la gauche. Sur les illustrations de la théorie de l’évolution, le dernier personnage se tient droit et fier, prêt à prendre sa course. On souhaite donc à Jewel Usain d’ajouter cette dernière forme à sa palette, pour que garçon devienne homme.
Rédacteur : Victor
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