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Le rap comme seul échappatoire

📀 The Notorious B.I.G – Ready To Die (1994)

Pierre angulaire de l’histoire du Hip-Hop, le 1er album de Biggie Smalls marque encore aujourd’hui de son impact. La création de Ready To Die est une des plus riches à analyser et le témoin d’un parcours aussi légendaire que tragique.

Plongeon dans le Brooklyn du début des années 1990, Christopher Wallace a.k.a The Notorious B.I.G est loin d’être destiné à une grande carrière artistique.


Ayant commencé à dealer à l’âge de 12 ans, il se retrouve rapidement coincé dans cet engrenage et n’a pas d’échappatoire.

Sa 1ère rencontre avec la musique se fait grâce à son voisin, Donald Harrison, saxophoniste reconnu sur la scène New Yorkaise, qui se lie d’amitié avec lui. Il l’introduit au monde du jazz, aux différents placements rythmiques des jazzmans et donc au phrasé instrumental.

Christopher fait ses 1ères rimes sur des drums de bebop jazz et développe son phrasé rap en accentuant des notes différentes. Alors que de nombreux rappeurs émergent en s’inspirant de leurs prédécesseurs, Biggie va apporter une nouvelle manière d’approcher cet art subtil.

S’il se révèle rapidement très talentueux, le jeune artiste est rapidement rattrapé par sa réalité et une carrière dans la musique semble impossible. Impliqué dans de nombreuses sales affaires, ses activités de rues lui rapportent de l’argent et une réputation dans son quartier.


Des bénéfices qui le poussent à continuer et relèguent la musique au 2nd plan. Christopher rappe uniquement dans des battles pour asseoir sa réputation et tout de même prouver qu'il est le meilleur.


Le quotidien des bad boys de Brooklyn n'est pas sans risques. La prison ou le trépas attendent nombre d'entre eux et Christopher sait qu'il faut qu'il sorte de cette spirale. Pourtant, à seulement 18 ans, il passe déjà 9 mois derrière les barreaux pour avoir dealé du crack.

Un passage par la case prison qui semble l'aider à réaliser que cette voie n'est pas la bonne et le pousse à sortir la mixtape Microphone Murder. Un projet qui va lui permettre de se faire un nom sur la scène de Brooklyn et se faire repérer par un personnage clé : Puff Daddy.


P.Diddy avait signé Biggie chez Uptown Records sur recommandation du DJ de Big Daddy Kane « Mister Cee ». Quand Diddy, qui est encore au début de sa carrière, se fait virer et fonde son propre label Bad Boys Records, il embarque avec lui sa jeune recrue.

Il décide de devenir le producteur exécutif du 1er album studio de The Notorious B.I.G qui sortira le 13 septembre 1994. D'autres producteurs comme DJ Premier l'accompagneront sur ce projet aux instrumentales chargées de samples, souvent utilisés de manière illégale.

Des titres désormais iconiques comme Ready To Die, Gimme The Loot et Machine Gun Funk ont été conçus sans l’accord des artistes samplés et ont mené le label à payer de lourdes amendes et supprimer les samples quelques années plus tard.

Ainsi tous les vinyles de Ready To Die n’ont pas les mêmes versions. Les rééditions récentes comme celles avec les disques silvers ou noirs ne contiennent pas les samples originaux, même s’ils ont été habillement remplacés et l’écoute n’est pas dérangée.

Pour écouter l’album dans sa conception originale, il vous faut un vinyle sorti avant le procès de 2006 ou la sublime version «Vinyle Me Please» dont les photos illustrent cet article. Cette dernière étant l’incarnation d’un vinyle rap de haute qualité au son comme à la pochette.

Une cover devenue iconique d’un bébé avec une coupe afro. Elle représente Biggie et met parfaitement en image le concept de l’album : compter la vie de l’artiste de sa naissance jusqu’à sa mort. Elle marque le début d’une longue série de covers d’albums avec des enfants dans le rap.

Ready to Die narre donc le quotidien de Biggie, utilisant un story-telling aiguisé pour dépeindre au mieux sa réalité. L’artiste parle de violences, de deal, de drogues, d’alcool et de femme. Des thèmes récurrents dans le rap mais qui ont un impact différent ici.

Christopher Wallace sert son vécu avec une écriture directe et impactante malgré une technique orale imparable. Chaque titre porte le poids du quotidien des rues de Brooklyn et dépeint un avenir sombre qui semble couru d’avance.

Au détour d’un interlude, Biggie se confie sur le fait qu’il a commencé le rap à 18 ans pour sortir de la rue et que la musique lui a permis d’échapper au destin tragique mais inévitable qu’ont connu nombre de ses proches. Il se sentait déjà prêt à mourir : Ready To Die.


L’album couvre sa vie, de sa naissance à sa mort, et se termine par le troublant Suicidal Thoughts. Un titre extrêmement bien écrit mettant en scène le suicide de Biggie et Diddy au téléphone incapable de le raisonner. Transition parfaite pour Life After Death qui suivra.

Le disque a été enregistré en 2 périodes à la suite des problèmes de label. D’abord en 1993 avec ses morceaux sombres comme Gimme The Loot puis en 1994 où il crée ses hits plus « commerciaux » comme Big Poppa. Entre les 2, Biggie retourne même dealer dans la rue.


Biggie surprend par sa capacité à créer des titres presque festifs tout en témoignant d’un quotidien sombre. Un exploit d’autant plus impressionnant quand certains des producteurs de l’album raconte que Wallace écrivait généralement les paroles directement dans sa tête


Les inspirations du Big Poppa sont nombreuses et on sent qu’il a consommé beaucoup de rap et rend hommage à cette discipline qu’il respecte.


Dès l’introduction, qui illustre en musique les passages marquants de sa vie depuis sa naissance, les clins d’œil s’enchaînent. On peut donc entendre dès le 1er titre de l’album un passage du Sugar Hill Gang comme de The Shiznit de Snoop Dogg. Une référence West Coast qui vient se ranger aux côtés d’un héritage New Yorkais fort très représenté.


Les hommages les plus marquants restent le célèbre “I live for the funk, I’ll die for the funk”emprunté aux Lords of The Underground sur Machine Gun Funk et la reprise des lyrics de C.R.E.A.M du Wu-Tang sur Who shot ya?, avant d’inviter Method Man sur The What.

On ressent également une certaine influence jazz qui va lui permettre de se différencier des autres rappeurs. Son phrasé semble similaire à celui de joueurs de batterie bebop, proposant des placements qui ont depuis influencé toute une génération.

Les titres iconiques s'enchaînent : Gimme The Loot, Machine Gun Funk, One More Chance, Everyday Struggle et Big Poppa pour ne citer qu’eux. L’album nominé aux Grammys possède même des remixs géniaux à découvrir comme celui de One More Chance.

Ready To Die est inévitable dans les classements des meilleurs albums rap de tous les temps. Il a marqué une génération et continue d’inspirer de nombreux artistes actuels. Les samples et références à ce monument semblent infinis et vont de Jay-Z à Travis Scott sur Sicko Mode.

Biggie Smalls a su marquer de par sa technique, son charisme derrière le micro inimitable et son écriture aussi franche qu’impactante. Un quart de siècle plus tard, ce chef d’œuvre semble toujours d’actualité et à la pointe d’un art qui touche un public toujours plus grand.

A l’aube de son 2nd album, Biggie sera assassiné à seulement 24 ans. Si Christopher Wallace était Ready To Die, le public n’était pas prêt à le voir mourir. Sa musique, elle, marquera l’histoire du rap à tout jamais.


Rédacteurs : Victor, Hugo


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